de Beauvoir et Sartre
64 x 64 cm - 2012


Commentaire de l'artiste 

Au début de leurs vies d’adultes, Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir avaient conclu un pacte d’amour. Ils établirent que leur amour était nécessaire mais qu’ils s’accorderaient d’autres amours contingents. Ils pourraient ainsi mieux découvrir le monde tout en s’assurant l’un l’autre d’une confiance absolue. Sartre lui a donc proposé de réinventer le couple. Simone de Beauvoir qui honnit l’institution bourgeoise du mariage ne pouvait qu’accepter. Leur union intellectuelle servit la cause de l’écriture. Ils s‘épaulèrent l’un l’autre. Lui, créateur de la totale liberté de l'homme. Son époque le porta aux nues. Elle, inventeur de la liberté des femmes. Son combat féministe fut encore plus ardu. Les fonds texturés bleu et noir en arrière-plan de leurs livres évoquent ces deux réalités. Leur pacte d’amour nécessaire s’accompagnait de contraintes. Comme celle d’une totale transparence. Simone ne pouvait refuser de lire les confidences grivoises de Sartre au sujet de ses aventures sexuelles. La tentation sadique est bien là. Dans l'entrechoc des génies et la dualité des sexes, comment s'affranchir du risque de dominer ou d’être dominé ? Le lacet d’organza qui unit leurs livres en un seul corps rappelle le cordon d’un corset. Il laisse flotter le parfum de quelques jeux pervers. De jeunes amantes de Simone devinrent aussi les maîtresses de Sartre. Incomparablement liés, l'étreinte de leurs esprits demeure marquée d’érotisme. Sartre et Simone connurent en effet des amours ailleurs. Le sexe disparut de leur relation mais jamais leurs intellects n’ont cessé de fusionner. Tout à la fin, quand il agonise sur son lit d’hôpital, Sartre lui chuchote « Vous êtes une bonne petite épouse ». Il meurt et elle l’embrasse sur la bouche. Aujourd’hui, ils reposent ensemble dans la même tombe du cimetière Montparnasse. Simone et Sartre ont construit librement leur existence. Existentialistes, ils ont affirmé leur subjectivité. Dans ses « Mémoires d’une jeune fille rangée », de Beauvoir décrit le dur chemin qu’il lui a fallu parcourir. Dans « Le Diable et le Bon Dieu », Sartre parle aussi de liberté mais à l’horizon de la tentation du mal. La position des livres reflète leurs façons respectives d’aborder le même enjeu par le dessus et par le dessous.

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