Il est dans la nature profonde de l’art contemporain de prétendre repousser les limites de l’art. Il s’agit donc de déconstruire les édifices mentaux antérieurs au risque de perturber une partie du public dont les attentes sont conservatrices. Celle-ci verra alors une forme de destruction dans le travail transgressif accompli par l’artiste. Ils diront « c’est laid », « je ne comprends pas », « cela ne me touche pas » ou, tout au moins, « je n’aime pas ». La sociologue de l’art Nathalie Heinich décrit en détail ce phénomène de rejet dans le livre. Rejet parfois violent comme par exemple lors de l’installation des colonnes de Buren au Palais-Royal à Paris en 1985. Mais loin de constituer une barrière, ces réactions extrêmement négatives ont contribué à une forme de consécration. Nonobstant les qualités esthétiques de l’oeuvre, la controverse a eu valeur de démonstration : si l’œuvre choque, c’est bien qu’elle repousse des limites. Il n’y a que l’indifférence pour tuer sûrement l’art contemporain. Dans la photographie, une masse noire pesante coule au travers du livre. Mais loin d’en subir le poids, celui du rejet de l’art contemporain, le livre se maintient haut dans la composition. Il semble même avancer, supporté par le flux multicolore des lignes en protension qui sortent par le bas du livre. Ce faisant, il s’éloigne d’une zone d’ombre grisâtre qui le mène vers un espace de lumière blanche, la gloire. >>> Back